EDUCATION
VIE SCOLAIRE
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aussi de lycéens, sont contraints, sous
prétexte d’« intégration », de ramasser
des déchets, de se déguiser, de s’exhi-
ber et de subir contre leur gré toutes
sortes d’actes humiliants et dégradants.
« Dans mon école, nous avons dû
ramasser par terre avec les dents des
pièces de monnaie sur lesquelles les
anciens avaient craché,
se souvient
une victime sur un forum en ligne.
L’horreur »
. Et il n’est pas rare que les
soirées dérivent vers des actes à conno-
tation sexuelle, vers des alcoolisations
extrêmes voire vers des coups ou du
harcèlement dont les conséquences
peuvent s’avérer dramatiques.
Encore trop d’idées reçues
Si le bizutage est toujours aussi présent,
c’est parce qu’il fait encore l’objet de
nombreuses idées reçues. Trop souvent,
les organisateurs des soirées d’intégra-
tion pensent que les faits qu’ils infligent
à leurs camarades ne sont « pas si gra-
ves ». A leurs yeux, il ne s’agit même pas
de bizutage puisque, affirment-ils, les
victimes ont le choix de participer ou
non et même de quitter les lieux à tout
moment s’ils le souhaitent. Et puis, si per-
sonne ne se plaint, c’est bien la preuve,
selon eux, que leurs petits jeux sont ano-
dins. C’est sans compter sur l’effet de
groupe et la loi du silence qui empê-
chent la plupart des victimes de réagir.
« Ils n’ont aucune idée de l’impact de
leurs actes,
explique la mère d’un
lycéen.
Mon fils a subi ce genre d’agis-
sements pendant plusieurs mois. A force
de culpabiliser et de garder tout pour
lui, il en est venu à faire une tentative
de suicide. Quant à moi, j’ai fait une
dépression et j’ai fini par perdre mon
emploi. Je ne sais pas si je pourrai conti-
nuer à financer ses études »
. Le garçon
a eu le courage de poursuivre son cur-
sus dans le même établissement, mais
nombreux sont ceux qui préfèrent, pour
ne plus côtoyer leurs agresseurs, chan-
ger d’école quitte à abandonner leurs
rêves de carrière.
Des chefs d’établissement
ferment les yeux
Les directeurs d’établissement ont aussi
leur part de responsabilité. Nombre
d’entre eux ont encore tendance à
www.peep.asso.fr- numéro 381 - Mai-juin-juillet 2014
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Marie-France Henry,
(ancienne responsable de Peep-Sup),
présidente du Comité national contre le bizutage (CNCB).
« Même si elle n’a pas permis d’éradiquer le bizutage, la
loi de 1998 a le mérite d’avoir fait évoluer les
mentalités. Il ne reste plus grand monde pour penser
que le bizutage est une tradition bénéfique à
l’intégration et à la construction des individus. Les
victimes hésitent de moins en moins à parler de ce
qu’elles ont vécu et à porter plainte. Quant aux parents,
ils sont nombreux à être inquiets et à prendre contact
avec nous parce que leur enfant doit participer à un
week-end d’intégration. Et c’est tant mieux, car le
bizutage ne fait qu’entretenir l’intolérance et le non-
respect de l’autre. Il n’existe pas de bizutage « gentil »
ou « bon enfant ». Le fait de vendre du papier toilette
dans la rue affublé d’un déguisement ridicule peut
paraître anodin, mais dès lors qu’il y a obligation naît
une forme d’humiliation et de soumission contraire à
l’égalité de droit des citoyens. On
constate de plus en plus que des
bureaux d’élèves pensent faire
taire les critiques en organisant
des manifestations à vocation
humanitaire, environnementale ou sportive. L’intention
est bonne à condition que tout le monde soit traité sur
un pied d’égalité. Dès lors qu’un groupe d’élèves est
chargé des basses besognes pendant que les autres
regardent ou dirigent, il s’agit de bizutage et ce n’est
pas acceptable. Cette forme de soumission n’a plus
aucune raison d’exister et les chefs d’établissement ont
un rôle important à jouer en prenant des mesures
sévères pour prévenir les actes de bizutage et en
sanctionnant de manière rapide et exemplaire les
auteurs. »
« Il n’y a pas de gentil bizutage »
minimiser les faits, voire à fermer les
yeux sur certains agissements pour ne
pas ternir la réputation de leur école. Et
quand ils prennent des mesures, elles se
limitent souvent à des avertissements
ou à des exclusions temporaires, peu
dissuasives et en aucun cas à la hau-
teur de la faute commise. Le déni de
certains chefs d’établissement est tel
qu’en septembre 2012, la ministre de
l’Enseignement supérieur et de la
recherche, Geneviève Fioraso a
adressé une note aux présidents d’uni-
versité et aux directeurs des grandes
écoles afin de leur rappeler que la loi
condamne aussi les personnes « qui ont
contribué à créer la situation ou qui
n’ont pas pris les mesures permettant
de l’éviter ».
La ministre leur a rappelé leur obligation
de prendre toutes les mesures nécessai-
res pour éviter que de tels actes se pro-
duisent, notamment en les incitant à
sensibiliser leurs élèves aux risques du
bizutage et en se rapprochant des
organisateurs des soirées d’intégration
pour en connaître les modalités et évi-