nes qui vivent dans la privation. Et l’étude
de préciser : « La privation en termes de
niveau de vie a une forte probabilité
d’être vécue par les enfants et les ado-
lescents comme une souffrance. Ce
n’est peut-être pas la privation en tant
que telle qui explique cette souffrance,
mais plutôt les effets qui l’accompa-
gnent en termes de difficultés d’intégra-
tion sociale. »
En outre, la souffrance psychologique
augmente avec l’âge pour atteindre son
paroxysme dans la tranche d’âge des 15
ans et plus (43 %). C’est ainsi que chez les
jeunes âgés de 12 à 18 ans, 31,5 % ont
déjà pensé au suicide et 11 % ont déjà
tenté de se suicider. Ces taux sont plus
élevés chez les filles, plus touchées par la
souffrance psychologique, chez les jeu-
nes en situation de privation (21 % ont
déjà tenté de se suicider) et chez ceux
vivant dans une famille monoparentale
ou recomposée, même si, là encore, ce
n’est pas le fait de vivre dans une telle
famille qui explique ce phénomène mais
les facteurs qui y sont associés. Les
réseaux sociaux se révèlent par ailleurs
être un facteur d’angoisse pouvant
entraîner des formes de harcèlement et
augmentant les risques de tentative de
suicide.
L’école n’aide pas les jeunes en
souffrance
Dans une société qui se veut démocrati-
que et égalitaire comme la nôtre, l’école
devrait être un refuge pour les jeunes en
situation de privation et/ou en souf-
france psychologique. Pourtant, la
consultation de l’UNICEF dévoile que
l’école ne fait qu’amplifier les difficultés
de ces jeunes. Selon l’étude, « elle ne
joue pas son rôle de reconnaissance ni
de protection ». Quelques chiffres
étayant cette idée : 45 % se sentent
angoissés de ne pas réussir assez bien à
l’école ; un tiers déclare pouvoir faire
l’objet de harcèlement ou être ennuyé à
l’école ; 8 % se sentent en insécurité à
l’école ; 24 % déclarent avoir peur des
adultes à l’école.
Chacun de ces résultats est plus élevé
lorsqu’il s’agit des jeunes en situation de
privation ou vivant dans une famille
monoparentale ou recomposée. De plus,
les jeunes qui se sentent en insécurité à
l’école ou qui ont peur des adultes ont un
risque plus élevé de penser au suicide ou
de faire une tentative de suicide, et les
jeunes angoissés de ne pas réussir à
l’école sont davantage touchés par la
souffrance psychologique. L’étude expli-
que : « Les difficultés ressenties par les
enfants et les adolescents à l’école peu-
vent aussi (en plus des difficultés liées à la
privation ou d’intégration sociale, ndlr)
provenir d’une pression excessive sur leurs
résultats et donc sur leur réussite. Le sys-
tème scolaire français, est, à bien des
égards, de nature élitiste. Il instaure une
hiérarchie entre les élèves et discrimine
de fait les mauvais élèves. » Et d’ajouter :
« Le système d’éducation français, loin
de corriger les inégalités, en réalité les
amplifie. La souffrance relationnelle qui
traverse l’institution scolaire devient un
défi que l’on ne pourra vraiment relever
que si l’on y implante des lieux ou des
temps d’écoute pour être attentifs à ce
que les enfants et les adolescents ont à
dire. »
Cette étude de l’UNICEF dévoile ainsi les
difficultés matérielles, relationnelles et
psychologiques que peuvent ressentir les
jeunes aujourd’hui. Mais, plus encore, elle
révèle un phénomène cumulatif : un
jeune en situation de privation matérielle
a moins de chance d’être intégré socia-
lement et sera davantage sujet à l’an-
goisse, aux peurs, à la souffrance psycho-
logique que les autres, voire à l’échec
scolaire et au suicide. Ces « inégalités
cumulatives, conclut l’étude, précèdent
les difficultés que ces jeunes risquent de
voir se prolonger au moment de leur vie
adulte ». Ecouter et aider les jeunes n’en
devient alors que plus important.
n
EC
EDUCATION
ZOOM
numéro 383 - Novembre-décembre 2014 -
www.peep.asso.fr6
L’AFEV pointe les difficultés des enfants de ZEP
Lors de la journée contre l’échec scolaire qu’elle a
organisée le 24 septembre, l’AFEV (association de la
fondation étudiante pour la ville) a dévoilé les
résultats d’une enquête comparant des écoliers de
zones d’éducation prioritaire (ZEP) et des écoliers
de quartiers favorisés. Le constat de l’enquête
réalisée auprès de 633 enfants est criant : les
premiers ont un fort manque de « capital culturel »
par rapport aux seconds. Ainsi, 10 % à 20 % des
enfants de quartiers prioritaires se trouvent « dans
un état de dénuement culturel particulièrement
important » : pas de départ en vacances, de spectacle,
de visite de musée, de livres... Seuls 47 % des enfants
de ZEP lisent le soir avant de dormir, contre 77 % des
enfants de quartiers favorisés. De plus, les premiers
sont moins aidés par leurs parents pour leurs devoirs
(24 % des enfants de ZEP ne le sont jamais contre
7 % pour les autres enfants) et se couchent plus tard.
L’étude de l’Unicef-France montre que les jeunes angoissés de ne pas réussir à l’école sont
davantage touchés par la souffrance psychologique.