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aux jeunes – de celle de 2013, cette der-

nière notait déjà qu’il existait « un lien

direct entre la privation matérielle ressen-

tie par les jeunes et les difficultés qu’ils

rencontrent pour s’intégrer dans la

société ». Les jeunes touchés par la priva-

tion matérielle sont donc de plus victimes

de difficultés d’intégration sociale, mais

aussi de souffrance psychologique.

Souffrance psychologique

et suicide

En effet, si plus du tiers (36%) des jeunes

âgés de 6 à 18 ans affirment être en souf-

france psychologique, ce sentiment est

sensiblement plus fort chez les jeunes tou-

chés par la privation matérielle. De plus,

alors que 11 % des jeunes disent ne pas

pouvoir compter sur leur père et 4,2 % sur

leur mère – ce qui induit une forme de

souffrance psychologique –, ces taux

passent respectivement à 23,6 % et

10,9 % chez les jeunes en situation de pri-

vation matérielle. Le résultat est égale-

ment plus élevé chez les jeunes vivant

dans une famille monoparentale ou

recomposée. L’étude ajoute : « Ne pas

être valorisé par ses parents peut consti-

tuer une souffrance tout aussi forte que

ne pas pouvoir compter sur eux ». Or, plus

de 17 % des jeunes disent ne pas se sentir

valorisés par leur père et 10 % par leur

mère, ce taux augmentant chez les jeu-

EDUCATION

ZOOM

www.peep.asso.fr

- numéro 383 - Novembre-décembre 2014

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et souffrance psychologique

(suite page 6)

Serge Paugam,

chercheur et sociologue qui a encadré l’étude 2014 de l’Unicef-France

« Adolescents en France : le grand malaise »

L’enseignement principal de l’étude, concernant

l’école, est qu’elle « ne joue pas son rôle de

reconnaissance et de protection ». Qu’est-ce que

cela signifie ?

L’école devrait valoriser l’élève et le pousser à donner le

meilleur de lui-même. Or, nous constatons que pour

beaucoup d’enfants il y a l’angoisse à l’école de ne pas

réussir, d’être dévalorisé par les résultats, qui provient

de la pression forte émise par l’école et les parents.

Quand ils ont de mauvaises notes, ils ont le sentiment

que l’école les rabaisse, les humilie au lieu de les aider.

52 % des répondants disent pouvoir raconter leur

problème à un adulte à l’école. C’est très faible ;

comment l’expliquer ?

24 % des enfants disent avoir peur des adultes à l’école,

la crainte d’être rabaissés. Pour les enfants en situation

de privation, le taux passe à 32 %. L’école est très

angoissante pour les enfants qui ont le plus de

difficultés. Or, pour pouvoir confier ses problèmes, il

faut avoir confiance. L’école devrait être un lieu

d’émancipation, de compensation pour les enfants qui

vivent des tensions dans le domaine

familial. Or, l’école reproduit les

inégalités et rabaisse les plus faibles.

Aujourd’hui, quand l’école est confrontée à des éléments

perturbateurs, la seule solution est de les exclure du

système scolaire, alors que l’enfant éprouve déjà des

difficultés dans sa vie personnelle. Cela explique le

décrochage et interroge sur les manières d’enseigner et

d’accompagner les plus faibles. L’école ne doit pas être

seulement un lieu qui permette d’avoir de bons résultats

scolaires mais doit permettre de réussir dans la vie.

72 % avouent que leur journée est trop longue et

qu’ils sont fatigués l’après-midi. Les nouveaux

rythmes scolaires amélioreront-ils ce taux ?

Ils vont dans le bon sens. Ce résultat montre que le

système scolaire, du point de vue des rythmes, n’est pas

adapté et que la fatigue joue dans les difficultés à

l’école. Il faut ajouter que les enfants ont parfois des

déplacements importants pour se rendre à l’école, ne

donnant pas les conditions pour réussir ces longues

journées.

« L’école est un lieu qui rabaisse les plus faibles »

Les conduites à risques sont plus importantes chez

les ados vivant des tensions avec leurs parents.