Le flou thérapeutique
Refusant de placer Nicolas en Itep
(Institut thérapeutique, éducatif et
pédagogique) – où il y avait de toute
façon une liste d'attente de plus d'un
an ! –, ses parents trouvent une solution
avec le médecin scolaire et l'équipe
éducative au travers de 2 heures puis de
4 heures d'Assistance Pédagogique à
domicile (Apad), définies par le PAI.
Gratuites pour les familles, ces heures de
cours dispensées pour Nicolas par un
professeur particulier au sein même de
son établissement lui redonnent
confiance et confirment même ses
grandes facilités d'apprentissage.
« Il y a
également une prof de maths à la
retraite qui, suite à un article paru dans
le journal, vient lui donner une heure de
cours tous les matins. Elle lui fait même
des interrogations où il excelle »
, se
réjouissent ses parents. Aujourd'hui,
Nicolas a 13 ans et demi. Il est suivi par
un Centre médico-psychologique
enfants adolescents (CMPEA) où il parti-
cipe à un groupe de parole une fois par
semaine avec un éducateur.
« Je le
trouve moins stressé, moins angoissé »
,
constate Sophie, sa maman.
Psychothérapie, Maison des Ados,
médecine parallèle… Corinne a
également tout tenté pour que sa
fille Camille, 13 ans en refus sco-
laire depuis le CE1, prenne
conscience de son état psychique
et arrête de se réfugier derrière son
problème de hanche, cause de
ses nombreuses somatisations. En
classe de 4
e
et de 3
e
, elle rencon-
tre régulièrement une pédopsy-
chiatre mais ne retourne pas au
collège pour autant. Pire, une
énième tentative avortée de
retour à l'école et le choix est fait
de la faire hospitaliser volontaire-
ment car la discussion demeure
malgré tout au coeur des rapports
mère-fille. Mais la souffrance et les
petites fugues n'améliorent pas son état
qui prend le virage de la dépression et
de la déscolarisation totale. Démunie et
sans prise en charge de la Maison des
Ados qui compte un an de liste d'at-
tente, Corinne va elle-même fixer de
petits objectifs, l'aider à se détendre…
« Je ne savais plus quoi faire pour l'aider,
la valoriser et je voulais arrêter cette
souffrance liée au collège. »
Cette expé-
rience va se révéler salutaire car Camille
réussit son brevet et fait son stage en
entreprise comme n'importe quelle
élève de 3
e
.
« De toute façon c'est moi
qui m'en sortirai toute seule »
: tels sont
les mots d'une jeune fille qui a depuis
courageusement retrouvé le chemin du
lycée et n'a jamais redoublé malgré de
longues années de déscolarisation.
Etonnamment – ou non –, son problème
de hanches a disparu…
Des parents en souffrance
Au-delà du parcours du combattant
EDUCATION
VIE SCOLAIRE
numéro 380 - Mars-avril 2014 -
www.peep.asso.fr6
Comme le précise Marie-France Le Heuzey,
« les
grands tournants de la scolarité comme le CP ou
la 6
e
sont des révélateurs de phobie scolaire »
.
Quand les élèves se sentent un peu plus en sécurité…
Depuis la rentrée, une 6
e
du collège Pierre-Abélard
situé à Vallet (44) expérimente une classe sans notes.
Si ce dispositif pédagogique a été mis en place au vu
des difficultés d'apprentissage de certains élèves arri-
vant de l'école primaire, il s'agissait également de
faire face à une contrainte de moyens et mutualiser le
poste d'une auxiliaire de vie scolaire. Et les difficultés
repérées vont de la dyslexie à la phobie scolaire pour
deux d'entre eux.
« Au CM2, ils n'étaient pas déscola-
risés mais ils étaient en souffrance, soit de potentiels
décrocheurs. Aujourd'hui, ils se sentent un peu plus
en sécurité dans cette classe sans notes »
, explique
Sylvia Pierre-Seiller, la professeur principale.
« Nous disposons d'une classe dédiée pour la plupart
des cours sauf ceux qui exigent une salle spécialisée.
C'est donc un endroit où ils peuvent entreposer des
documents, une salle-repère qui tend à les rassurer. »
Côté pédagogie, l'accent est mis sur l'autonomie avec
un plan personnalisé de travail validé par quatre
paliers : acquis, non acquis, en cours d'acquisition,
presque acquis. Grâce à un logiciel adapté, les parents
des 24 élèves reçoivent un bulletin indiquant les acqui-
sitions et les non-acquisitions de leur enfant.
« Tout l'intérêt de cette démarche est dans la trans-
mission de ces apprentissages et l'accent mis sur le
vivre ensemble. Les élèves qui auraient pu décrocher
ou auraient été en difficulté dans notre classe sont
quand même maintenus dans la course. »
La mixité
des niveaux est fondamentale d'autant que la diffé-
renciation pédagogique pratiquée permet aux plus
avancés de poursuivre sur leur lancée. Pour l'année
prochaine, l'incertitude est de mise mais l'envie de ces
enseignants volontaires reste intacte d'autant que
l’établissement scolaire se situe en milieu rural sans
d'autres alternatives proches pour les parents d'en-
fants en difficulté.