Previous Page  6 / 36 Next Page
Information
Show Menu
Previous Page 6 / 36 Next Page
Page Background

numéro 396 - Mai-juin-juillet 2017 -

www.peep.asso.fr

6

alerte-t-il.

Dans la phrase, « Longtemps,

je me suis couché tôt », le mot « long-

temps » fait partie intégrante du prédi-

cat car si on le retire, on change com-

plètement le sens de la phrase. Le ris-

que, c’est que les enseignants de pri-

maire se limitent à l’étude de phrases

basiques qui n’aideront les élèves ni à

lire, ni à écrire, ni à penser ».

Des parents désorientés

Depuis, la polémique est passée et les

tensions se sont apaisées. Mais sur le ter-

rain, la notion de prédicat n’a pas

encore atteint tous les élèves de cycle

3. Si de nombreux enseignants de pri-

maire l’ont intégrée à leur enseigne-

ment sans que cela ne pose de pro-

blème particulier, tous ne l’ont pas fait,

parfois par conviction mais le plus sou-

vent par méconnaissance ou par man-

que de formation. Car, parmi les ensei-

gnants, rares sont ceux qui maîtrisent

cette notion et la manière de l’ensei-

gner aux élèves. Les manuels ne l’abor-

dent pas encore. Quelques vidéos à

visée pédagogique existent bien sur

Internet, mais elles sont peu nombreuses

et pas toujours mises en avant. Quant à

la formation initiale et continue, il faudra

plusieurs années pour qu’elle atteigne

tous les enseignants.

Mais si le prédicat soulève autant de

passions, c’est peut-être surtout parce

qu’il remet en cause des décennies

d’apprentissage et qu’il déboussole une

bonne partie des parents. Alors que jus-

que-là ils pouvaient venir en aide à leur

enfant pour repérer le COD ou le COI et

accorder le participe passé ; avec le

prédicat, c’est plus compliqué. Ils se

retrouvent ainsi privés d’une partie de

leurs prérogatives. Le changement est

d’autant plus important que le prédicat

n’est pas le seul changement institué

par la réforme. Celle-ci prévoit aussi

l’abandon des termes « compléments

circonstanciels » de temps ou de lieu,

pour les regrouper sous l’appellation

unique de « complément de phrase ».

Un niveau en baisse

Il est encore trop tôt pour dire quel sera

l’impact réel de cette nouvelle réforme

sur la maîtrise par les élèves de la gram-

maire. Mais une chose est sûre : il y a

urgence à changer les choses. Selon la

dernière enquête « Les performances

en orthographe des élèves en fin

d’école primaire » menée par la

Direction de l’évaluation, de la pros-

pective et de la performance (DEPP) de

l’Education nationale (note d’informa-

EDUCATION

VIE SCOLAIRE

Une majorité de linguistes a pris fait et cause pour le prédicat. Selon eux, la notion de

complément d’objet est trop compliquée à appréhender par des élèves de primaire…

Francette Popineau,

co-secrétaire générale et porte-parole du syndicat d’enseignants

du primaire Snuipp

« La majorité des collègues a intégré les nouveaux

programmes à leur enseignement. D’une part parce que

c’est leur rôle et d’autre part parce qu’il est important

que tous les enseignants de France s’appuient sur une

base commune. Beaucoup trouvent d’ailleurs dans le

prédicat un outil intéressant pour appréhender plus

globalement la construction de la phrase avant

d’aborder des notions plus complexes, comme les

compléments d’objet. Les enseignants l’adaptent à leur

pédagogie. Certains n’utilisent même pas le mot

« prédicat », préférant parler de « groupe fort ». Mais le

gros souci, c’est la faiblesse de la formation initiale et

l’absence de formation continue et de supports qui

obligent les enseignants à s’approprier par eux-mêmes

les nouveaux programmes, sans être certains que tout

ne sera pas remis en cause dans quelques mois. »

« Les enseignants se sont appropriés

par eux-mêmes les nouveaux programmes »