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Les enseignants appliquent-ils la

réforme ?

Oui, en théorie, depuis 2008, c’est-à-dire

depuis que la nouvelle orthographe est la

référence.

« Depuis cette date, l'école pri-

maire a joué le jeu. Au collège, la situation

est plus contrastée »

, a constaté Viviane

Youx, présidente de l'association française

des enseignants de français (AFEF). Réti-

cents, les professeurs ?

« Ils le sont beau-

coup plus au lycée »

, observait-elle en-

core.

« Cette réforme ne prend pas. Les

professeurs écrivent comme ils savent

écrire »

, résume de son côté Jean-Rémi

Girard, professeur de français et vice-pré-

sident du syndicat national des lycées et

collèges (SNALC).

Une disparité d’application selon les ni-

veaux ? Difficile de généraliser. Chaque

professeur des écoles, chaque ensei-

gnant use en réalité de sa propre mé-

thode. En revanche, tous s’accordent sur

le fait que le problème de l’apprentissage

de l’orthographe se trouve ailleurs. Au-

delà de l'orthographe lexicale, il porte sur

leversante de l’orthographe qui eût altéré

le visage familier du français et dérouté

tous ses usagers répartis sur la planète ».

L’idée était plutôt de « proposer des re-

touches et aménagements, correspon-

dant à l’évolution de l’usage, et permet-

tant un apprentissage plus aisé et plus

sûr ». De fait, les professeurs devaient seu-

lement tolérer l'orthographe rectifiée dans

les copies d'examen…mais n’étaient pas

tenus de l'enseigner en classe. Nouvel épi-

sode en 2008 : le Bulletin officiel (BO) du

ministère de l'Éducation nationale hors-sé-

rie du 19 juin 2008 précisait en effet alors

que « l'orthographe révisée est la réfé-

rence » : « pour l'enseignement de la lan-

gue française, le professeur tient compte

des rectifications orthographiques propo-

sées par le Rapport du Conseil supérieur

de la langue française, approuvées par

l'Académie française ».

Rebondissement quatre ans plus tard : le

BO du 3 mai 2012 rappelle que « les rectifi-

cations [...] restent une référence mais ne

sauraient être imposées. [...] Dans l'ensei-

gnement aucune des deux graphies (an-

cienne ou nouvelle) ne peut être tenue

pour fautive. » Dernier épisode en date, la

référence à l’orthographe simplifiée re-

vient dans le BO du 26 novembre 2015.

Une nouvelle orthographe que L’Acadé-

mie française n’a jamais imposée et qui

reste facultative. Dans les faits, les ensei-

gnants n’ont donc pas à sanctionner un

élève qui continuerait à écrire « oignon »

avec un « i » ou « huître » avec un accent

circonflexe.

l'orthographe grammaticale, la syntaxe,

la compréhension de la langue et le vo-

cabulaire.

« Ces recommandations ne ré-

pondent en rien aux réels problèmes or-

thographiques que connaissent nos

élèves et les adultes qu'ils deviennent,

poursuit Jean-Rémi Girard.

Il manque un

enseignement structuré de la gram-

maire. »

Dans sa déclaration du 16 février 2016,

alors que la polémique fait rage en

France quant au « péril » couru par l’ac-

cent circonflexe, l’Académie française ne

dit d’ailleurs pas autre chose :

« Plus que la

maîtrise de l’orthographe, défaillante,

c’est la connaissance même des structu-

res de la langue et des règles élémentaires

de la grammaire qui fait complètement

défaut à un nombre croissant d’élèves,

comme le montrent les enquêtes interna-

tionales menées ces dernières années,

qui, toutes, attestent du net recul de la

France par rapport à d’autres pays euro-

péens dans le domaine de la langue »

.

n

PK

EDUCATION

VIE SCOLAIRE

numéro 393 - Novembre-décembre 2016 -

www.peep.asso.fr

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L’esprit de la réforme : « proposer des retouches et aménagements, correspondant à l’évolu-

tion de l’usage, et permettant un apprentissage plus aisé et plus sûr ».

Delphine Cassoulet,

directrice de l’école élémentaire de Naujan-et-Postiac (Gironde)

« J’applique la réforme quand cela simplifie l’orthographe

pour les élèves. Par exemple dans la conjugaison des

verbes en « eler » et en « eter », on supprime les doubles

consonnes et tous les verbes, sauf appeler et jeter,

prennent un accent. Je l’applique aussi pour les mots qui

commencent par « contre » ou « entre » comme

« entretemps » ainsi que pour le pluriel des mots

composés comme « des allume-cigares ». Parmi les mots

que change la réforme, il n’y en a finalement que très peu

que l’on utilise à l’école, soit parce qu’ils appartiennent au

langage soutenu, soit parce qu’ils sont

d’origine étrangère. On n’emploie pas tous

les jours les mots « ognon » et « nénufar ».

A notre niveau, je dirais que la réforme

concerne environ une petite trentaine de mots. En réalité,

j’applique cette simplification de l’orthographe, qui date

de 1990, depuis cinq ou six ans maintenant. Je le fais

savoir aux parents d’élèves dans les informations qui leur

sont communiquées en début d’année scolaire et cela n’a

jamais posé aucun problème ».

« Une petite trentaine de mots est concernée »