douze heures d’enseignement par an sur des
compétences comme transmettre les valeurs
de laïcité, de morale, car l’essentiel est des-
tiné à la formation disciplinaire. Mais on réflé-
chit, notamment à d’autres formes d’ensei-
gnement pour former aux débats. Les jeunes
enseignants se rendent compte que c’est
important. Il y a une « chance » à saisir, d’au-
tant que la ministre nous a donné ce qu’il
manquait : des directives précises. »
En effet, à la suite d’une « Grande mobilisa-
tion » qui a consisté en la réception, par la
ves sur des mots, des thématiques. Depuis, on
n’a plus eu de faits de racisme... »
Former les enseignants
Autre question qui a surgi avec force au len-
demain des incidents liés au non-respect de
la minute de silence en hommage aux victi-
mes des attentats : le manque de formation
des enseignants à la laïcité et, plus largement,
à la gestion des conflits, aux débats.
« Pour
tout ce qui est gestion humaine, c’est clair
que l’on manque de formation »
indique
Mathilde, jeune enseignante de français dans
un collège de la région parisienne. Car l’ensei-
gnant a d’autres missions que celle d’ensei-
gner seulement des connaissances disciplinai-
res.
« Il faut dire aux enseignants : vous êtes
des fonctionnaires de l’Etat, vous avez aussi
des valeurs à transmettre »,
estime Céline Rigo,
secrétaire nationale du syndicat SE-UNSA.
Ainsi, dans les ESPE (Ecoles supérieures du pro-
fessorat et de l’éducation) où sont désormais
formés les futurs enseignants, on assiste à une
« conscientisation », selon le terme d’Alain
Mougniotte, directeur de l’ESPE de Lyon qui a
organisé le 31 janvier dernier une « journée de
la laïcité » et qui prévoit une Université d’été
sur la laïcité en juillet prochain.
« La prépara-
tion à ces questions est sans doute trop
légère,
concède-t-il.
A Lyon, il y a seulement
DOSSIER
LAÏCITÉ ET « VIVRE ENSEMBLE » À L’ÉCOLE
« Je suis arrivé, déjà assez affecté, au collège le jeudi
midi, et je suis tombé sur des collègues complètement
dépités après la minute de silence. J’avais, la veille,
collecté des arguments un peu partout. J’ai décidé de
ne pas faire cours mais de discuter. Je me suis dit que
j’avais un rôle social plus important que de leur faire
faire du handball. J’ai été très surpris par leur propos,
très violents. J’ai entendu des phrases comme « Leurs
dessins ont blessé les Musulmans comme les balles ont
blessé Charb ».
La direction nous incitait à faire remonter à la police
les propos des enfants. Je n’ai pas voulu car c’était de
la lâcheté, se débarrasser du problème. L’école est le
lieu où la liberté d’expression doit se faire. Ce n’est pas
en limitant la parole qu’on va pouvoir argumenter et
défendre des valeurs.
Ce qui s’est passé est horrible mais c’était l’occasion de
faire notre métier d’éducateur. Il a fallu argumenter, en
citant des passages du Coran notamment, qui dit le
contraire de ce qu’ils pensaient. Le problème est que
ceux qui étaient très énervés ne laissaient pas la parole
aux autres car dès que je faisais un vote sur une idée, la
grande majorité ne pensait pas comme eux.
Ainsi, en se rendant compte qu’ils ne faisaient pas
l’unanimité, ils se rangeaient un peu. A la fin même,
quand j’ai demandé « Est-ce que Charlie a mérité ce qui
lui est arrivé ? », il n’y avait plus de mains qui se
levaient… »
« Ce n’est pas en limitant la parole qu’on va pouvoir
argumenter et défendre des valeurs. »
Bastien Capel,
professeur d’éducation physique et sportive dans un collège de Seine-et-Marne
En 6
e
et 5
e
, les élèves étudient
la naissance des grandes reli-
gions avec notamment des
extraits des textes fondateurs,
dans un « esprit de laïcité res-
pectueux des consciences et
des convictions ».
(suite page 24)
www.peep.asso.fr- numéro 385 - Mars-avril 2015
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