EDUCATION
VIE SCOLAIRE
ler au passé ?
(suite page 8)
nationale constate qu’un redoublement
affecte négativement la motivation, le
sentiment de performance et les com-
portements d’apprentissage des élèves,
les conduisant à se sentir stigmatisés. Elle
en veut pour preuve qu’à niveau égal en
fin de 3
e
, les élèves « en retard » obtien-
nent de moins bonnes notes que les élè-
ves « à l'heure ».
Des cas spécifiques
Rien d’étonnant pour Antoine, professeur
d’histoire-géographie en région pari-
sienne, qui constate que deux redou-
blants présents respectivement dans ses
classes de 5
e
et de 4
e
subissent plus le
redoublement qu’autre chose.
« Ce sont
des élèves qui ont du mal à s’intégrer
dans la dynamique de la classe, qui res-
tent sur la réserve, sur la berge. »
L’enseignant l’explique par un sentiment
de honte qui se transforme en position
d’illégitimité par rapport aux autres.
Résultat : pas de progression
spectaculaire ni même d’étin-
celle. L’un de ses collègues en
revanche se souvient d’un élève
qui avait redoublé pour cause
de grand degré d’immaturité et
qui était méconnaissable après
son redoublement. Didier, pro-
fesseur de français dans un col-
lège lillois, est lui plus catégori-
que :
« la peur du redoublement
met au travail tous les élèves qui
ne veulent pas redoubler. Le sup-
primer est stupide »
.
Et quel point de vue chez les
parents ? Pour Christine, qui a refusé le
redoublement pour sa fille en 5
e
, la
« peur » du redoublement avait fonc-
tionné,
« peur de quitter ses camarades
et de se retrouver avec des plus jeunes
qu’elle »
; et l’année suivante, en 4
e
,
« elle s’est vraiment mise à travailler. Elle
avait pris conscience des enjeux »
. Autre
www.peep.asso.fr- numéro 391 - Mai-juin-juillet 2016
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situation, celle vécue par Hugo, à qui il
aura fallu malgré tout un redoublement
en seconde générale et technologique
pour qu’il passe en filière scientifique,
celle qu’il souhaitait. Ici, le redoublement
fait partie d’une stratégie scolaire effi-
cace pour empêcher une orientation
Mme Veylon,
principale du collège Pablo Picasso à Montfermeil (classé REP)
Le recours au redoublement a-t-il été abusif ?
Pas dans notre collège. La commission d’appel n’existe
plus qu’en 3
e
donc nous avons la main sur le passage en
seconde générale. Mais les parents ont pour obligation
de discuter avec nous et d’entendre le dernier mot de
l’établissement et l’exigence attendue au lycée.
Résultat : le taux de parents qui font appel est bas. Sur
130 élèves seulement 6 appels.
Pour cela nous faisons un travail de fond avec les
professeurs principaux et la conseillère d’orientation
dès l’entrée en 3
e
en leur parlant d’orientation, en les
emmenant dans des forums, en leur faisant faire des
mini-stages dans des lycées professionnels et en les
familiarisant avec la procédure des entretiens de
motivation.
A la fin du 2
e
trimestre, je reçois généralement entre 15
et 20 parents d’élèves pour réfléchir à un autre projet
que la seconde générale. Nous les aidons à chercher
une voie professionnelle qui pourrait les faire arriver au
même type d’études après un bac pro grâce à la
formulation de vœux de secours. Rien n’est pire pour
les élèves que de se sentir coincés.
Quel choix dans ce cas pour les élèves en grande
difficulté ?
Doubler ou ne pas doubler n’est pas le plus gros
problème car il y a des dégâts psychologiques lors du
doublement. Mais pour des élèves qui arrivent en 6ème
avec déjà de grosses lacunes, l’écart ne va cesser de se
creuser. Or, au collège les professeurs ne sont pas
formés pour apprendre à lire. Il nous manque un
dispositif pour ces élèves en difficulté, même si, avec la
réforme, l’accompagnement personnalisé est compris
dans les heures de cours.
« des dégâts psychologiques lors du doublement »