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les procédures car on n’a pas les moyens

d’améliorer le système,

explique Jérôme

Dammerey.

Or, il ne faut pas rabattre les

conditions de sécurité des jeunes car les

accidents du travail sont plus nombreux

chez eux en proportion que chez les

salariés plus expérimentés. Le jeune n’est

pas concentré de la même manière, il a

besoin d’une attention particulière. »

Des accidents en forte baisse

Du côté des entreprises, on prône la

confiance.

« Quel est l’intérêt de l’entre-

prise de mettre le jeune en danger ?,

demande Irène Guillaume.

Elle est res-

ponsable et assure évidemment la sécu-

rité de ses salariés. Et puis, les entreprises,

ce sont aussi des individus, des parents

qui ont des enfants. On ne met pas les

enfants en danger. » « Puisque c’est désor-

mais déclaratif, bien sûr qu’on peut tri-

cher,

admet Nicolas Chaffurin, ensei-

gnant au lycée agricole de Mâcon-

Davayé,

mais ce n’est dans l’intérêt de

personne, pas même de l’entreprise car

s’il y a un souci, c’est elle qui est embê-

tée. »

En outre, depuis plusieurs années, la

sécurité des jeunes travailleurs a été ren-

forcée.

« Si on a assoupli, c’est parce qu’il

y a d’autres garanties, d’autres contrain-

tes »

, estime Nicolas Chaffurin. Un rapport

de 2015 du Conseil général de l'alimenta-

tion, de l'agriculture et des espaces

ruraux (CGAAER) a d’ailleurs relevé une

division par deux environ du nombre

d’accidents d’élèves ou d’apprentis

entre 2002 et 2012.

« On a intégré des

parties concernant la sécurité dans les

modules professionnels et les diplômes,

on a imposé un certain nombre d’exigen-

ces au chef d’établissement et au maître

de stage, celui-ci devant notamment for-

mer les jeunes aux risques qu’il encoure.

Et puis il y a le “document unique” »

pré-

cise Joëlle Guyot. Ce “document uni-

que” (DU), qui concerne tous les

employeurs de main d’œuvre, consiste

en une évaluation et un inventaire des ris-

ques devant permettre de prendre des

mesures afin de les limiter.

« La mise en

place du DU a « écrémé » les maîtres de

stage, où seuls les plus sérieux sont res-

tés »,

assure Nicolas Chaffurin.

Rester vigilants

Malgré cela, le décret de 2015 laisse chez

certains un goût amer.

« Je peux enten-

dre que les entreprises sont responsables,

lance Jérôme Dammerey,

mais en tout

cas, cette décision ne va pas améliorer

les conditions de travail et de sécurité des

jeunes. Il y avait une autre solution :

remettre des moyens dans l’inspection du

travail pour garantir les conditions de

sécurité. » « On fait un travail de fond,

répond Joëlle Guyot.

On responsabilise

les acteurs. On n’en avait pas les moyens,

mais même si on avait pu mettre plus

d’inspecteurs du travail, cela aurait été la

solution de facilité. Il faut être pédago-

gue et faire progresser ces sujets chez les

maîtres de stage et chefs d’établisse-

ment. »

Olivier Bleuven, quant à lui, pro-

pose de repousser la première période

de stage :

« Les élèves partent en stage à

peine six mois après leur arrivée dans

l’établissement : on n’a pas le temps de

les former à tous les risques ! »

Les parents

d’élèves ont également un rôle à jouer.

« Les enseignants font au moins une visite

dans l’entreprise pour chaque stagiaire,

mais on ne peut pas voir tous les risques,

on n’en a pas les compétences,

expli-

que Nicolas Chaffurin.

Les parents doi-

vent rester vigilants et ne pas hésiter à

contacter l’établissement s’ils constatent

quelque chose. »

n

EC

Le secteur de la menuiserie, comme ceux de

la métallurgie ou du bâtiment, sont particu-

lièrement concernés par les nouvelles règles

de sécurité.

EDUCATION

ZOOM

numéro 387 - Août-septembre-octobre 2015 -

www.peep.asso.fr

6

Laurent Chardigny,

co-gérant du Domaine viticole de Rochebin, à Azé (71)

« On a actuellement trois apprentis, et deux stagiaires

devraient bientôt nous rejoindre. Nous sommes très

concernés par ce décret car les outils que nous utilisons

sont presque tous considérés comme dangereux ! Il y a le

sécateur électrique, les tracteurs, la pompe à vidange, le

pressoir… Il y a même des risques avec le gaz de

fermentation qui dégage du CO2. Du coup, on doit lister,

dans la déclaration, tous ces outils que peuvent utiliser

les apprentis. Mais on fait très attention avec la sécurité,

c’est la même chose pour les apprentis que pour les

employés. On explique beaucoup les choses, on répète

beaucoup les règles.

Aussi, il y certaines tâches que les apprentis ne peuvent

pas faire : conduire un Fenwick car il

faut un permis, réparer une machine qui

est bloquée... Je leur demande de

m’appeler, car ils n’en ont pas les

compétences et c’est dangereux. Ils ne

font qu’utiliser l’appareil. Il n’y a pas vraiment de risques

car nos appareils sont aux normes, et puis on a des visites

de professeurs et d’inspecteurs du travail qui peuvent

toujours voir ce qui ne va pas. Mais, au final, cette histoire

de déclaration est presque idiote car les enseignants

savent très bien ce qu’on utilise comme outils et que pour

faire du vin, il faut un pressoir. Et certaines entreprises

peuvent de plus déclarer ce qu’elles veulent… »

« On répète beaucoup les règles aux apprentis »