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Grand Témoin

Nathalie Mons

La Voix des Parents : Le Cnesco, que vous présidez, est né de

la loi du 8 juillet 2013. Quelles en sont les principales mis-

sions ?

Nathalie Mons : Le Cnesco est une instance indépendante

du ministère de l’Education nationale dont la principale mis-

sion est d’évaluer le fonctionnement et les résultats du sys-

tème éducatif ainsi que les méthodologies des évaluateurs

internes au ministère de façon à en garantir

la robustesse scientifique et à éviter toute

instrumentalisation politique. Son rôle dans la

diffusion des résultats des évaluations et de

la recherche est crucial afin d’éclairer l’ac-

tion des praticiens, depuis la classe jusqu’au

ministère.

VDP : Que va apporter cette nouvelle ins-

tance à une évaluation des élèves déjà bien

fournie ?

NM : Il y a concernant l’éducation trop d’idées non étayées

scientifiquement qui appauvrissent notre débat public. Le

Cnesco va mener des conférences de consensus sur des

aspects qui posent question, tels que la lecture, le redouble-

ment ou l’apprentissage des mathématiques, dans le but

d’harmoniser les différentes recherches. Des forums ouverts

aux parents et aux citoyens seront aussi organisés en région

sur des sujets tels que la notation ou la mixité sociale.

Enfin, grâce aux très nombreux chercheurs français et inter-

nationaux qui le composent, le Cnesco sera en capacité de

rassembler des compétences multiples sur des sujets particu-

liers d’évaluation, en s’appuyant sur des méthodes statisti-

ques ou des entretiens qualitatifs. C’est à ce prix que notre

connaissance du système scolaire et de ses blocages pourra

encore plus progresser.

VDP : D’après vous, la baisse du niveau scolaire des élèves

français pointée par plusieurs études est-elle une réalité ?

NM : Il existe des domaines où les compétences des élèves

ont régressé, mais d’autres où elles ont pro-

gressé. Une étude de la DEPP de 2012 mon-

tre par exemple que, sur la période 1997-

2007, les compétences langagières, l’ortho-

graphe et la compréhension se sont détério-

rées, mais pas les automatismes mobilisés

dans la lecture. D’autre part, certaines com-

pétences sont nouvelles ou plus valorisées

qu’avant, comme la maîtrise du numérique

ou la pratique de l’oral. Le Cnesco est là

pour montrer la complexité de la situation et

pour rechercher les causes des détériorations.

VDP : Peut-on vraiment inverser cette tendance ?

NM : Il suffit de regarder ce qui se passe à l’étranger pour se

rendre compte que tout n’a pas été tenté. Notre école est

très conservatrice dans son fonctionnement et s’appuie

encore sur des outils peu efficaces : une notation stigmati-

sante dès le primaire, une faible mixité sociale, des redouble-

ments très nombreux, une aide individualisée insuffisante aux

élèves en difficulté, une faible formation continue des ensei-

gnants, pour ne citer que quelques exemples. La marge de

progression est immense !

Nathalie Mons

est présidente

du CNESCO,

Conseil natio-

nal d’évalua-

tion du système

scolaire.

DOSSIER

www.peep.asso.fr

- numéro 381 - Mai-juin-juillet 2014

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Diplômée de Science-Po Paris, Nathalie Mons a rejoint l’université après un parcours d’une

quinzaine d’années dans le secteur privé en France et à l’étranger. Elle est aujourd’hui professeur de

sociologie à l’université de Cergy-Pontoise (95), consacrant ses recherches à l’analyse des politiques

publiques d’éducation. Elle dirige le Conseil national d’évaluation du système scolaire (Cnesco) depuis

janvier 2014.

« Notre école est très

conservatrice dans son

fonctionnement »

« Il existe des

domaines où les

c o m p é t e n c e s

des élèves ont

régressé, mais

d’autres où elles

ont progressé. »