- numéro 392 - Août-septembre-octobre 2016
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MAGAZINE
EN FAMILLE
famille à l'autre. Dans le cas de Caroline,
la procédure d’émancipation de sa fille
découle d’un changement de rési-
dence.
« Je vais déménager à Marseille
mais ma fille de 16 ans ne souhaite pas
me suivre car elle veut rester avec son
ami de 18 ans. »
Selon Nathalie Renard,
« le plus souvent les demandes sont faites
pour des jeunes partant faire leurs études
à l'étranger, ou pour des jeunes mères de
famille qui ont l'autorité parentale mais
ne peuvent pas gérer leurs propres affai-
res. Mais les demandes peuvent égale-
ment concerner de jeunes gens préco-
ces qui désirent se lancer dans le
commerce, créer leur société, ou dans
des cas où le mineur ne vit déjà plus
avec sa famille, où il est déjà auto-
nome »
.
Il existe aussi des demandes d'émanci-
pation qui émanent de parents n'arrivant
plus à gérer un adolescent difficile,
« mais il ne s'agit pas des cas les plus im-
portants »
, souligne l’avocate. Car il ne
doit évidemment pas s’agir pour les pa-
rents d’un moyen de se décharger de
leurs responsabilités.
Déroulement de la procédure
Comment se déroule la procédure
d’émancipation ? Le juge reçoit la de-
mande, puis convoque le jeune pour
une audition. Quand un seul parent fait
la demande, le juge entend celui qui n'a
pas signé la demande ; « dans les faits le
juge considère souvent qu'il est plus
éclairant d'entendre les deux parents »,
précise Nathalie Renard. Une fois les au-
ditions faites, le juge prend sa décision et
la communique rapidement.
Dans tous les cas, l'émancipation ne sera
é avant l’heure ?
(suite page 34)
L’émancipation d’un enfant mineur est-elle une
décision importante ?
L'émancipation n'est pas un acte à prendre à la légère.
Un jeune émancipé perd la protection liée à sa condition
d'enfant mineur. Il devra être suffisamment mature pour
être reconnu légalement auteur de ses actes, mais aussi
pour pouvoir s'assumer sans l'aide de ses parents et
gérer seul tous les actes de la vie courante. Une
immersion précoce dans la vie d'adulte qu'il faut donc
avoir mûrement réfléchie.
La procédure d’émancipation semble simple et
rapide, est-ce la réalité ?
La procédure est simple et ce n'est généralement pas
très long. Mais il est préférable que chaque famille se
renseigne avant auprès du Tribunal d'Instance du lieu de
résidence pour connaître les délais et l'encombrement
des tribunaux.
Un refus du juge des tutelles est-il toujours
possible même si les parents sont d’accord ?
L'émancipation correspond à une situation bien
particulière, c'est une exception car un enfant mineur
est un enfant protégé. Donc, si l'intérêt de l'enfant n'est
pas justifié, si au cours de l'audition le juge estime que le
jeune n'est pas suffisamment mature pour subvenir lui-
même à ses besoins et gérer sa vie, ou s'il estime qu'il
n'y a pas de « juste motif », il pourra refuser
l'émancipation du mineur. La famille pourra alors
contester ce jugement devant la cour d'appel.
« Une immersion précoce dans la vie
d'adulte qu'il faut avoir mûrement réfléchie »
Nathalie Renard,
avocate au barreau de Paris
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, les
demandes d’émancipation trouvent rarement
pour origine un conflit entre le mineur et ses
parents.