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Turbulent ou hyperactif ? Les parents d’enfants agités se sont tous posé cette question au moins une fois. Quelles sont les

clés pour comprendre ce trouble, réel handicap social et scolaire pour les enfants concernés ?

MAGAZINE

SANTÉ

numéro 389 - Janvier-février 2016 -

www.peep.asso.fr

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Hyperactivité :

faut-il s’inquiéter ?

«M

on fils est infernal, il

est sûrement hyper-

actif ! »

Le raccourci

est de plus en plus

courant pour des parents désemparés

face à un enfant turbulent. Mais si le trou-

ble de déficit de l’attention avec ou sans

hyperactivité ou TDAH peut sembler de

plus en plus répandu, il ne concerne en

fait que 5 % des enfants scolarisés en

école élémentaire – notons d’ailleurs que

les TDAH sont reconnus comme trouble

d’apprentissage au même titre que les

DYS, depuis 2014. Ce chiffre, avancé par

la pédopsychiatre Marie-France Le Heu-

zey, n’explique donc pas tous les cas d’en-

fants qualifiés de « difficiles » par leurs pa-

rents. Il s’agit là d’une notion compliquée

à traiter, souvent liée au seuil de tolérance

de chacun. Un seuil qui a évolué avec le

temps, car les exigences scolaires et fami-

liales ont beaucoup changé.

« Le contexte

familial est différent d’il y a 50 ans, les deux

parents travaillent beaucoup et enchaî-

nent avec des temps de transport,

insiste

Isabelle Roskam, professeur de psycholo-

gie à l’université de Louvain en Belgique.

Stimuler son attention

Si le TDAH existe, attention à la tendance

des « faux positifs » pour des enfants qui

sont en réalité dans la norme supérieure

de la catégorie que l’on pourrait qualifier

des « très vifs ». Pour mieux appréhender

ce trouble, il faut savoir qu’il associe trois

symptômes différents : l’inattention, l’im-

pulsivité et l’hyperactivité.

« Ces trois com-

portements sont tellement intenses et fré-

quents qu’ils empêchent l’adaptation de

l’enfant au sein de la famille, de l’école…

»

, précise le professeur Isabelle Roskam.

Un enfant qui en souffre montre donc de

l’agitation quel que soit le milieu dans le-

quel il se trouve : à l’école, à la maison,

chez les grands-parents. Il est important

de multiplier les environnements différents

et les interlocuteurs différents avec l’en-

fant avant de s’alarmer.

« De toutes façons, nous recommandons

de ne jamais poser de diagnostic avant 6-

7 ans »

, préconise le professeur de psy-

chologie. Le TDAH peut en effet être lié à

une immaturité de la zone préfrontale du

cerveau. Or, entre 2 ans et 7 ans cette

zone va se développer, se complexifier et

le travail des neurotransmetteurs va se

perfectionner.

« Mais avant la fin de cette

maturation il est déjà possible de se ren-

dre compte qu’un enfant a des difficul-

tés. On peut l’aider en stimulant cette ré-

gion du cerveau encore très plastique.

Cela peut se faire avec des jeux de so-

ciété comme “Taboo”, “Jacques a dit”,

“L’œil de lynx”, le “ni oui ni non”, qui ap-

prennent à garder en tête une consigne

et à mûrir la réponse adaptée. »

Si un traitement médicamenteux (après

avis médical bien entendu) est parfois

utile, une rééducation dans l’apprentis-

sage doit être faite en parallèle.

« Grâce

à une prise en charge précoce, ces en-

fants restent dans le système scolaire clas-

sique et la majorité d’entre eux réussis-

sent »

, se félicite Isabelle Roskam.

n

Quelles sont les conséquences de ce trouble sur la vie à la

maison et à l’école ?

Il s’agit souvent d’enfants pas très soigneux, qui perdent

beaucoup leurs affaires et qui exigent beaucoup de patience

surtout pendant les devoirs. Leur impulsivité entraîne des petits

catastrophes domestiques, enfants maladroits qui « renversent » beaucoup.

Il est très frustrant pour ces enfants d’avoir des résultats scolaires qui ne sont

pas à la hauteur de leurs capacités intellectuelles ou des efforts fournis. Ils vont

engranger des échecs qui sont mauvais pour leur estime d’eux-mêmes. Ils sont

souvent réprimandés et montrés comme la bête noire de la classe.

Que faire quand les parents sont inquiets ?

Ils peuvent interroger les autres interlocuteurs de l’enfant comme à la crèche ou

à l’école pour connaître leur avis. Ensuite, les parents peuvent trouver des

professionnels qui sont en mesure de les rassurer ou de les accompagner dans

un processus d’évaluation et de prise en charge éventuelle.

« Impulsivité et maladresse »

Isabelle Roskam,

professeur de psychologie et auteure de « TDAH à l'école :

Petite histoire d'une inclusion » (Editions du Petit ANAE – Pleiomedia)