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que de bagarre a diminué. Les élèves prennent plus de précautions dans les moments de colère. Ensemble, on pose une grande limite. » Florence Delannoy avait appliqué cette méthode à Roubaix. « On a fait des conseils de discipline à la chaîne pendant 6 mois, puis les choses se sont apaisées. Cela a permis de rétablir le tabou de la violence physique dans l’éta- blissement. » Depuis, elle défend une ap- proche intransigeante. « On rappelle col- lectivement trois lignes rouges : violences physiques, violences verbales envers le personnel et addictions/trafics. » Et les rè- gles sont strictes : par exemple, trois re- tards de 5 minutes entraînent deux heures de retenue. Proviseur en Seine-Saint-Denis, Bruno Bob- kiewicz, secrétaire national du SNPDEN (syndicat des personnels de direction), re- fuse l’idée du laisser-aller. « Il n’est pas question d’être plus souple pour acheter la paix sociale. On se doit d’avoir la même exigence partout. » Il prône visibi- lité et réactivité « Tous les matins, je suis à la grille d’entrée. On est aux côtés des en- seignants. Tous les signalements doivent être traités. Le pire, ce serait de laisser faire, de ne pas apporter de réponse. » Sécuriser les établissements Faut-il aller plus loin, solliciter la police ? Ghislaine Bazir sourit : « Elle est déjà pré- sente dans les établissements ! » « C’est une fausse question, abonde Philippe Do- natien. Nous disposons de correspon- dants police/gendarmerie, avec qui nous travaillons. Nous sommes représentants de l’État : en cas de problème, il est de notre responsabilité de les solliciter. » Par contre, il semble difficile d’envisager une présence permanente. « Cela provoque- rait une émotion dans la communauté éducative » , alerte Bruno Bobkiewicz. Phi- lippe Donatien y voit un mauvais mes- sage : « Ce serait un aveu d’impuissance. On mène un travail d’éducation, même si on doit parfois être répressif ou coerci- tif. » Didier Sablic craint, lui, une stigmati- sation : « Quel parent aurait envie d’ins- crire son enfant dans un lycée qui a besoin de policiers ? » . À défaut, Florence Delannoy se pose la question des vigiles. « Aujourd’hui, le per- sonnel à l’entrée n’a pas de réelle forma- tion sécurité : ce sont des surveillants, sou- vent de jeunes étudiants, et des agents de loge. Avoir quelqu’un qui demande à ou- vrir le sac, comme dans les supermarchés, cela peut être une réponse ponctuelle. » Comme la loi l’y autorise, Ghislaine Bazir effectue ponctuellement ces contrôles. Il y a parfois des armes dans les sacs : mar- teau, spray de défense… « On sanc- tionne, mais on creuse le problème. Des élèves expliquent que c’est pour se proté- ger des bandes dans le RER. Certains pa- rents mettent eux-mêmes une bombe au poivre dans le sac de leur fille… » En 2015, le lycée de Montauban a été équipé de portiques s’ouvrant avec une carte ma- gnétique. « Cela a contribué à apaiser l’établissement, témoigne Philippe Dona- tien. On a moins de bagarre. Le lycée est plus privatisé, donc sécurisé. » Mais Bruno Bobkiewicz ne voudrait pas que « les éta- blissements se transforment en bunker. Pour que le climat soit bon, il faut une confiance a priori… » L’école comme lieu d’exutoire Mais comment faire confiance, quand tout peut se retrouver sur internet ? « C’est cela qui est nouveau dans les violences scolaires, juge Ghislaine Bazir. Les réseaux sociaux ont un impact, provoquent une transmission et une visibilité rapides. » « Cela nous met en difficulté, reconnaît Bruno Bobkiewicz. Beaucoup de choses nous échappent : invectives, insultes... » Philippe Donatien le constate les lundis ma- tin. « L’établissement est un point de rallie- EDUCATION ZOOM (suite page 15) www.peep.asso.fr - numéro 404 - Janvier-février 2019 13 Plan d'actions pour la protection de l'École Le 31 octobre, à la suite de l’agression d’une enseignante à Créteil (photos ci-contre), le ministre de l’Education, Jean-Michel Blanquer a annoncé quelques mesures du Plan d’actions pour la protection de l’École. Entre autres : une réorganisation des conseils de discipline (délais raccourcis avec moins de membres), le recours plus fréquent à des « sanctions de responsabilisation » (remise en état de peinture ou du matériel dégradé, etc.), et le signalement systématique de tous les incidents dans un registre, dont une synthèse annuelle doit être présentée au conseil d’administration. L’ensemble du plan et ses détails devaient être dévoilés mi-décembre, notamment le volet concernant une présence policière dans les établissements scolaires. La crise des Gilets Jaunes et les manifestations lycéennes ont poussé le Gouvernement à retarder cette présentation, attendue désormais dans les prochaines semaines. Dans les violences scolaires, « Les réseaux sociaux ont un impact, pro- voquent une trans- mission et une visi- bilité rapides », juge Ghislaine Bazir, proviseur d’un lycée francilien.

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